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À tire d'elle

19 juin 2008

*6*

C'est drôle, même les souvenirs que j'ai de l'hiver avec toi, ils brûlent. Tu es une fille d'été, de chaleur, dans ma tête tu as toujours incarné la couleur du soleil sur les pierres. Je nous revois dans l'herbe du grand parc, cachées derrière le vieux canapé que nous positionnions de telle manière que la voisine ne nous voient pas. Secrets et confidences. Tu fumais, je piquais allégrement dans tes cigarettes et de temps à autre, quelqu'un se relevait pour aller chercher le vin blanc dans le frigo. Il n'y avait rien d'autre à faire que d'être là, à apprendre à se connaître et à faire l'amour. Il était aux anges, vivant à cent à l'heure, et moi j'avais peur, déjà, je crois. J'avais peur quand, du coin de l'oeil, je voyais sa peau frissonner à ton contact, et même à ton regard. Au milieu de toute cette lumière il y avait comme une ombre qui grandissait dans mon ventre et qui obstruait ma gorge, puis tu me souriais et je buvais une gorgée de Tariquet et plus rien n'avait d'importance. Que d'être là. Et de se jeter dans la gueule du loup.

Étrange comme le ciel peut être bleu, parfois, et annoncer l'orage.

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10 juin 2008

*5*

Tu vois tu as tout cassé. Comment t'expliquer, comment te faire sentir la brêche que tu as ouverte en moi, une gargouille vorace et goulue qui engloutit ma substance pas à pas, sans être pressée, mais implacablement. Inexorablement. Je m'étiole, les jolies choses ne sont plus. Tu les as emportées, gâchées, souillées et salies, juste parce que tu pouvais. Juste parce que tu savais que tu serais la plus belle, la plus forte, forcément puisque inconnue, nouvelle, versatile et légère. Si légère. Aussi éphémère qu'une bulle de savon tu virvoltais et on avait envie d'arrêter de respirer pour que tu ne te brises pas.

Après la bataille j'ai essayé de réparer, lui aussi. Qui de nous deux a échoué, je ne sais pas, peut-être que c'était juste la vie, mais là tu vois, aux vues du pitoyable bilan que je fais de mon existence aujourd'hui, je sais que j'irais mieux si tu n'avais pas été. Je ne dis pas que tu es la cause de tout. Mais tu as posé ton talon pointue pour écraser, diminuer, finir, achever ce qui, peut-être, était déjà en route. Je te détèste. Ce soir, vraiment, probablement parce que je vais si mal, je te détèste.

5 juin 2008

*4*

Tu comprends maintenant j'ai cette image de toi fichée en moi comme la colonne d'un temple. Si je la retire tout l'édifice s'effondre mais il n'y plus de place sur ce terrain de chair pour construire quoi que ce soit d'autre. Les mots sont tellement faux, c'est que du vide et des tracés arrondis comme des volutes de fumée. Parce que même quand je m'arrache les doigts à vouloir dire ce que je ressens quand tu étrangles ma mémoire ce n'est jamais ça. Jamais vraiment. La nuit je me débats tant que je voudrais m'achever la tête à grand coups dans le mur.

Mais toi tu t'en fous, hein, tu t'en fous.

Quand je parle de toi, c'est pathétique, je me réfugie dans des blagues idiotes sur les blondes. Je ricane quand on prononce ton prénom ou alors je ne dis rien et je fais celle qui est au dessus de tout ça.

Au dessus de quoi? De la trahison, du mensonge? Au dessus des regards  qui viennent te prendre ta confiance par le coeur, comme on appâte avec une sucette à la framboise une petite fille qu'on va violer dans les bois? Au dessus du dégoût, de la peur que cette douleur revienne, au dessus du mépris de soi, de l'image dans le miroir qu'on en vient à haïr plus fort que tout? Au dessus de ce sentiment de vide si grand qu'il vous engloutit un peu plus avec chaque aube?

Au dessus du champ de ruine que tu as laissé?

Je fais semblant que je suis au dessus mais je suis au dessous. J'ai toujours été au dessous avec toi, depuis le tout premier jour, même si je ne le savais pas encore.

29 mai 2008

*3*

On était sur nos gardes, pourtant, il me semble. On avait épluché les erreurs à ne pas commettre et celles qu'on se permettraient. Des conversations calmes et douces, lui et moi, parce que nous voulions des expériences de désir et de feu, mais que nous savions la limite, tout près, de la violence et de la destruction.

Mais c'était sans compter  les fantasmes qui grandissent, les bouches qui mentent, et les yeux qui demandent chaque jour un peu plus d'horizon à repousser.

Je n'avais pas peur. Je le lui avait dit, redit, j'avais promis que je me sentais bien. Je l'avais rassuré même: ce serait beau avec toi, je savais, et tes mains me serraient la confiance bien fort. J'ai appris à te connaître le soir et la nuit, quand tu buvais du champagne et que tu fumais tes cigarettes nue, allongée à même le sol ou appuyée contre le battant de la fenêtre du balcon. T'étais belle dans la pénombre de la ville. Au dessous de nous, il y avaient des passants nocturnes et des voitures en bruit de fond. Ils frôlaient ces instant, en étaient les voyeurs aveugles, instruments d'ambiance qu'on se créait; amusées comme des gamines de savoir qu'ils ne savaient pas. On parlait des heures, tous les trois, et lui et moi on avait d'yeux que pour toi et pour ta jeunesse teintée d'intense. Tu disais "je suis bien", tu murmurais "c'est incroyable ce qu'on vit" et c'était vrai. Pour moi, tout était vrai.

27 mai 2008

*2

Il y a eu les fièvres du début. Notre première rencontre. Je te guettais, je t'espérais, j'avais des vagues d'images possibles de toi qui ricochaient dans ma tête. Tu étais déjà là, il m'a soufflé "c'est elle" et pas une seconde je me suis dit "c'est vrai, il l'a déjà vue, lui". Les yeux braqués sur toi en catimini j'ai fait le tour des atouts et des défauts, des ressemblances surtout. À part nos arrondis dans les hanches, on aurait pu être soeurs de contraire. T'avais des cheveux d'été, à la garçonne, qui prenaient tous les reflets de la fenêtre derrière toi et s'irisaient de blé. Mais quand je me suis approchée j'ai su que je ne verrais que tes yeux d'oubliettes, des eaux qui changent de couleur au gré du temps, comme les océans des îles. Tout autour il y avait ta peau douce de blonde, comme un chevalet sur lequel la main du peintre aurait posé tes prunelles, avec un coup de pinceau plus appuyé, spontané, presque inévitable.

Je n'ai vu ni tes lèvres, minces et pointues, ni le danger qu'il y avait à tenter le diable.

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23 mai 2008

*1

Il y a eu tes mots d'abord, maladroits mais époux des miens. Je t'ai lu d'un pays à l'autre, à travers cet écran qui d'habitude éloigne. Là, c'était comme si tu t'étais branchée directement dans ma tête. Un rêve en vrai. Tu disais les choses que je pensais, et à en juger par tes réponses, tu pensais les choses que je disais et que je te confiais, doucement, puis de plus en plus vite, par petits bouts d'emails. Putain, c'était comme jeter des bouteilles à la mer, sauf que tu les recevais à tous les coups.

Je t'ai aimé tout de suite. Avant de t'avoir vu je savais déjà que c'était toi.

23 mai 2008

Avant-propos

Tous les matins me réveillent en me parlant de toi et du miroir faussé que tu m'as tendu. J'avais cru voir une âme soeur, une image idéale de la femme que je ne savais pas être, une vie pour remplir les mille vide qui gueulaient en moi. Je me suis trompée, ou est-ce toi, ou est-ce cet été là qui nous a jeté ainsi, violemment l'une contre l'autre alors que tout n'était que mensonge, que tout était voué à être sale et rageur et violent de désirs inavoués.

Ce blog est l'histoire que je dois écrire pour me débarrasser de toi, de vous, de nous.

Cette une fiction que j'ai vécu.

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